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Décryptage. Finances dans le rouge, incertitudes sur les droits TV, réforme de la LFP sur les rails… : où va la Ligue 1 lors de cette intersaison ?

C’était promis. Lorsque l’épidémie de Covid a mis les championnats à l’arrêt, puis que la bulle Mediapro a explosé, le football professionnel français devait en profiter pour se réinventer. Cinq ans plus tard, et après un nouvel épisode de la fuite en avant achevée sur le fiasco du dernier appel d’offres des droits TV, il n’est cette fois pas loin de toucher le fond. Avec 1,3 milliard de pertes d’exploitation attendu sur cette saison (dont 92 % concentrées sur la L1) et la fin de contrat anticipée avec le diffuseur DAZN, il va vivre un exercice 2025-2026 en forme de tournant.

« Ce qui est bien, c’est que ça va obliger de repartir d’une page blanche », dit l’ancien président des Girondins Stéphane Martin, qui avait proposé sa candidature à la présidence de la Ligue de football professionnelle (LFP) en septembre dernier.

À deux vitesses

L’ère Vincent Labrune, lancée en septembre 2020, n’a pas été sans impact : objectif assumé, les six premiers du championnat qui s’est achevé samedi sont aussi six des sept clubs ayant reçu le plus d’argent de la manne versée à la LFP par le fonds d’investissement CVC en 2021 (contre 13 % à vie des revenus engendrés par la Ligue). Seul Rennes ne l’a pas fructifié.

« Quitte à choquer, ce championnat à deux vitesses est une bonne chose, acquiesce Stéphane Martin. Il y a besoin de locomotives pour maintenir l’indice UEFA et quatre places en Ligue des champions. La principale attractivité de la L1 pour des investisseurs est de se dire qu’il est plus facile d’y accéder. Mais la question est de savoir à quel point les gros clubs vont maintenant être touchés par la paupérisation ». Car la manne CVC est épuisée et Nicolas de Tavernost, recruté à la LFP pour créer et vendre une chaîne 100 % L1, a fait passer le message : il est très probable que les clubs redémarrent sans aucun minimum garanti sur des droits TV. Soit pour 15 d’entre eux plus de la moitié de leurs revenus hors transferts.

« À court terme, il n’y a pas vraiment de solutions alternatives »

La plupart des « gros » clubs, soutenus par un actionnaire puissant financièrement (Paris SG, Marseille, Monaco, Rennes) et/ou ayant su assainir son modèle (Nice, Lille), devraient en profiter pour accroître leur avance en limitant la casse grâce aux revenus européens. Lyon, en grosse difficulté financière après six années sans Ligue des champions, est lui en danger. « Perdre l’OL serait une catastrophe dans l’attractivité, alors que les Girondins et Saint-Etienne (relégué) manquent déjà à la L1 » pour Stéphane Martin.

Dégraissage massif

Derrière ? Brest « aurait mis la clé sous la porte sans les revenus de la Ligue des champions » disait la semaine dernière son entraîneur Eric Roy. La phrase sonne également aux oreilles des Lensois, qui avaient touché la manne de la C1 un an plus tôt, mais aussi fait quelques folies qu’ils ont dû corriger par des ventes massives de joueurs.

Le « dégraissage » salarial et du nombre de contrats va être un fil conducteur de l’intersaison du plus grand nombre avec la nécessité de développer des ressources hors droits TV. Strasbourg (rénovation de la Meinau), Brest (nouveau stade), Lens (rachat du stade Bollaert) misent ainsi sur l’infrastructure.

« Mais à court terme, il n’y a pas vraiment de solutions alternatives. Même si les affluences sont bonnes, on reste loin des recettes guichets de l’Angleterre ou l’Espagne. La meilleure chose à espérer, c’est qu’avec l’arrivée de Nicolas de Tavernost, les droits TV soient moins catastrophiques. Tout le monde s’est rendu compte que c’était confortable d’avoir Canal+. Le problème : Canal a pu voir qu’il pouvait se passer de la L1, et les clients aussi », pointe Stéphane Martin.

Pour 2025-2026, la DNCG a demandé aux clubs de monter leurs budgets avec les hypothèses les plus basses possibles et s’attend à multiplier les encadrements stricts sauf garantie déposée par les actionnaires. L’espoir à moyen terme ? Que la future chaîne L1 et la réforme de la LFP sur les rails redorent le produit.

Dans ce paysage, les arrivées de la famille Arnault, qui a racheté le Paris FC (promu en L1), ou de Xavier Niel à Créteil (N2), détonnent. Le point commun : ces grandes fortunes françaises ont misé sur des clubs de niveaux inférieurs moins impactés par la crise, et qui, pour le premier, a su grandir de manière mesurée depuis 15 ans. Le modèle à suivre ?

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Cédric

Depuis 1998, je poursuis une introspection constante qui m’a conduit à analyser les mécanismes de l’information, de la manipulation et du pouvoir symbolique. Mon engagement est clair : défendre la vérité, outiller les citoyens, et sécuriser les espaces numériques. Spécialiste en analyse des médias, en enquêtes sensibles et en cybersécurité, je mets mes compétences au service de projets éducatifs et sociaux, via l’association Artia13. On me décrit comme quelqu’un de méthodique, engagé, intuitif et lucide. Je crois profondément qu’une société informée est une société plus libre.

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