Girondins de Bordeaux. De 33 à 69 millions d’euros d’apports : la promesse de Gérard Lopez au tribunal de commerce
Dans le plan de continuation des Girondins de Bordeaux pour les dix prochaines années, qui sera présenté le 27 mai au tribunal de commerce, le sort réservé aux 42 millions d’euros dus par le club à son président-propriétaire Gérard Lopez est évidemment scruté. L’homme d’affaires s’est astreint au régime proposé à tous les créanciers, à l’exception de Fortress (4 millions proposés sur 11 millions dus) et l’Etat (100 % de remboursement) : si son plan est homologué, il ne touchera que 10 % de sa dette, soit 4,2 millions d’euros.
L’Hispano-Luxembourgeois s’appuie sur deux logiques. La première est qu’il a investi beaucoup d’argent dans le club et qu’il n’est pas anormal, à ses yeux, d’en récupérer une petite partie. Elle se heurte toutefois à un principe fondamental : tout investissement comporte une part de risque, surtout dans le sport. Difficile de justifier un quelconque remboursement après une succession d’échecs stratégiques, un plan social massif, et alors que des entreprises locales et des collectivités (qui grincent des dents) sont aussi concernées.
La seconde logique apparaît plus noble, puisque Gérard Lopez touchera au mieux cet argent dans onze ans, une fois que tous les créanciers auront été remboursés selon le plan. « En aucun cas, je ne ferai passer mes (42) millions avant le club », disait-il à « Sud Ouest » en septembre dernier. Sur ce point précis, il a tenu parole.
Montées ou vente
Deux clauses de retour à meilleure fortune (CRMF), des sortes de bonus, sont prévues par le plan de continuation. Elles ne concernent pas Fortress ni l’État. Une CRMF sportive (montée en Ligue 2 d’ici 2033 et maintien durant au moins trois saisons, ou montée en Ligue 1 d’ici 2035) donne droit à un remboursement non pas de 10 % mais de 30 % pour tous les créanciers, Lopez compris. Il passerait ainsi de 4,2 à 12,6 millions d’euros perçus.
Une seconde CRMF existe en cas de cession, si le club est vendu entre le 1er janvier 2027 et le 31 décembre 2035 pour 80 millions d’euros minimum. Elle ferait grimper le taux de remboursement de 10 % à 20 %, mais cette fois, Gérard Lopez ne serait pas concerné. Mieux : l’homme d’affaires prendrait cette dépense supplémentaire à sa charge. Ce qui pourrait le pousser à vouloir vendre le club encore plus cher… Le scénario d’une cession à un tel prix paraît toutefois bien improbable aujourd’hui.
Huit millions dès cet été
Un autre point central du plan est le soutien financier de l’actionnaire au cours des douze prochaines années. Trois scénarios sportifs ont été anticipés : remontée en Ligue 2 en 2028 puis en Ligue 1 en 2030 (« le plus probable » selon le club) ; remontée en Ligue 2 en 2032 ; plafonnement en National 1. Au total, selon les budgets prévisionnels établis, Gérard Lopez devra apporter 33, 61 ou 69 millions d’euros sur la période. « Quel que soit le scénario, il abondera pour le financement des activités du club », est-il promis au tribunal de commerce dans le plan.
Dès cette intersaison, le chèque à signer sera conséquent. Entre le remboursement de Fortress (quatre tranches de 500 000 euros), d’une partie des AGS (qui ont financé les salaires de juillet 2024 et le plan social), le paiement d’une première tranche de dettes et bien sûr le fonctionnement du club sur la saison 2025-2026, environ 8 millions d’euros seront attendus de la part du propriétaire. Pour un club de quatrième division, c’est probablement du jamais-vu en France.
Tonneau des Danaïdes
Après quatre ans d’échec et 52 millions engloutis en comptant le rachat du club en 2021, une question revient, au sein des Girondins et autour : pourquoi Gérard Lopez continue-t-il de remplir un tonneau des Danaïdes plutôt que de céder la place ? Lui répond d’abord que personne d’autre ne s’avance pour faire les virements nécessaires. En ce qui le concerne, finir par rentabiliser l’opération sur le long terme semble illusoire. Peut-être pourra-t-il simplement réduire un peu les pertes. Cela prendra du temps et passera nécessairement par une réussite sportive.
L’homme est de toute évidence animé par une soif de réussite, douze ans après avoir mené le club de sa ville natale au Luxembourg, le Fola Esch, de la deuxième division jusqu’au titre de champion national. C’est aussi, peut-être, une question de crédibilité dans un monde sportif qui ne lui pardonnerait pas un énième échec, après ses départs de Lotus et du Losc, tandis que Mouscron a coulé en Belgique et que Boavista descend en D2 portugaise.
« Je n’ai aucun agenda. J’ai juste envie que le club se retrouve là où il doit être. Je ne veux pas abandonner le navire », expliquait-il à « Sud Ouest ». Pour l’instant, à la barre, c’est toujours lui.
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