« Qu’un maximum de filles puissent jouer au foot », le FC Pas du Loup continue de grandir 10 ans après sa naissance
Entretien avec le président Nordine Maktoubi qui mène avec ses équipes des projets d’envergure pour développer de ce club pas comme les autres.
Comment se porte le FC Pas du Loup ?
On se rend compte, avec le temps, qu’on commence à récolter les fruits de nos dix ans de dur labeur. C’est rassurant parce qu’on est passé parfois par des phases un peu compliquées comme tous les clubs, et surtout lorsqu’on crée un club à partir de rien. Le format que nous avons choisi, c’est-à-dire fonctionner par projet sportif et associatif par mandat de trois ans, est concluant.
Comment l’expliquez-vous ?
Partir de rien, c’est difficile. Nous n’étions pas identifiés, nous étions craints par les autres clubs. La solidarité vient plus tard. Les trois premières années, le projet était de créer un club. Les trois suivantes, il a fallu pérenniser ce qu’on avait mis en place et aller rechercher les ressources financières et humaines. Les trois dernières années, l’objectif a été d’aller rechercher les moyens matériels. Parce que nous n’avions pas de stade digne de ce nom et pas de locaux… Enfin, le mandat dans lequel nous sommes actuellement, consiste à développer toutes les actions sociales et sociétales. On pensait vraiment que les entreprises allaient se joindre à l’action mais le football n’a pas bonne presse, encore moins dans les quartiers. Donc c’est compliqué pour certaines entreprises, à l’échelle locale, de se mobiliser. C’est risqué de poser son image sur un club de quartier, parce que malheureusement, parfois, il y a ces difficultés qu’on peut rencontrer avec les supporters et au sein du jeu. Nous, on a fait ce choix-là de ne pas avoir d’adultes, et ça nous a exemptés de ce genre de problèmes. C’est un choix qui aujourd’hui s’avère payant.
« La chapelle au milieu du village »
Vous avez surtout décidé de mettre en avant les féminines…
Les joueuses ont la possibilité d’aller dans des clubs comme l’ASPTT Montpellier ou Jacou-Clapiers. Mais au-delà de ça, quand elles voulaient seulement jouer au football, pas forcément faire de la grande compétition, il n’y avait pas de proposition sportive. On a développé tout un pan sur la féminisation. C’est ce qui nous a valu d’être lauréats d’un prix en 2023 à l’échelle nationale. On a aussi ouvert une ludothèque qui permet aux mamans joueuses et aux mamans bénévoles de pouvoir laisser leur enfant dans un lieu sécurisé avec des bénévoles qui s’en occupent. Cela a permis de faire venir des femmes. Il a fallu lever ce frein-là. Avant ça, on a levé le frein économique en proposant la licence gratuite. Nous sommes allés encore plus loin en ouvrant des sessions de sport adapté. On a récupéré des crénaux dans une salle de musculation mise à disposition et rénovée par la Ville. Aujourd’hui, on a 60 femmes qui pratiquent du sport adapté à la salle de sport. Le club de football est là, un peu comme la chapelle au milieu du village. On y vient, on toque à la porte et on entre.
Ouvrir un club de foot à des jeunes filles, à des filles, à des femmes, qu’est-ce que ça admet ?
Pour adapter une zone qui était historiquement et inconsciemment réservée aux hommes, aux petits garçons, aux garçons, on ne peut pas proposer la même chose. Contrairement à d’autres sports, le football ne fait pas de différence entre le foot féminin et le foot masculin. Il y a les mêmes règles, le même ballon, le même arbitrage. Cela permet déjà de mettre les filles et les garçons sur un pied d’égalité. Ensuite, on a eu la chance d’avoir des filles avec un bon niveau de jeu. Et ça, c’est facilitateur, parce qu’il n’y a pas mieux qu’une jeune fille qui balade avec un garçon sur le terrain pour faire taire les stéréotypes. Enfin, on est aussi arrivés un peu avec nos gros sabots. On a dit c’est comme ça et pas autrement. C’est ça la belle évolution pour le football féminin. Ce n’est pas juste d’avoir un maximum de filles. C’est qu’un maximum de filles puissent jouer au football.
Une nouvelle récompense pour le FC Pas du Loup
Deux ans après avoir reçu le prix Sensationnelles, le FC Pas du Loup a, cette fois, été célébré lors des 17e Trophées Philippe-Séguin qui récompensent des clubs amateurs pour leurs actions RSO. Le club de Montpellier a reçu le Grand Prix Solidarité & Inclusion, décerné par la Fondaction du Football, lors d’une cérémonie au Pavillon d’Armenonville à Paris, jeudi 15 mai. Parmi plus de 400 candidatures, le club montpelliérain a été distingué grâce à son projet d’espace pluridisciplinaire mêlant éducation, sport, santé, inclusion, numérique et ludothèques. « C’est une reconnaissance nationale pour un projet né localement, avec très peu de moyens mais énormément d’engagement, de conviction et d’inventivité, a réagi le club après ce succès. Ce prix met en lumière un travail collectif de terrain, réalisé souvent dans l’ombre et sans les soutiens suffisants que mérite ce type d’initiative. » Sur le terrain, cette fois, le FC Pas du Loup va tenter de remporter un titre puisque les joueuses de son équipe U15 qui ont déjà remporté leur championnat joueront la finale de la Coupe de l’Hérault le 29 mai prochain.
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