Une « Premier League à la française » : la proposition de Philippe Diallo pour tenter de sortir le football français de la crise – L’Humanité
« Un projet de rupture. » L’intention est claire. Pour sortir les clubs professionnels de la crise financière et de gouvernance dans laquelle ils baignent, Philippe Diallo a décidé de reprendre le pouvoir. Un peu plus de deux mois après avoir lancé les états généraux du football français, une promesse faite durant sa campagne, le président de la Fédération française de football (FFF) a décidé de mettre de l’ordre en annonçant, lundi, le remplacement de la Ligue par une « société de clubs » en charge des questions commerciales.
Le patron de la FFF, réélu en décembre, a restitué les préconisations issues des travaux lancés début mars. Face à la mauvaise image renvoyée par la Ligue de football professionnel (LFP) avec la chute des droits télé, , le piratage massif ou encore le déficit des clubs estimé entre 1,2 et 1,3 milliard d’euros, trois groupes de travail avait été mis en place sur la gouvernance, la régulation financière et le développement économique.
La DNCG et la commission de discipline passeraient dans le giron de la FFF
« On va passer d’une Ligue, qui était une association loi de 1901, à une société commerciale dont les clubs seront les actionnaires », a indiqué Philippe Diallo. Le projet prévoit aussi un bouleversement en termes de gouvernance puisqu’« il n’y aura plus de président élu à la Ligue, mais des professionnels nommés et rémunérés pour diriger cette future société commerciale ». Et d’ajouter : « On avait la Fédération, la LFP et la société commerciale. Dans notre projet, il n’y a plus qu’une Fédération et une société de clubs, on rationalise. La LFP était presque devenue une coquille vide. »
Une véritable reprise en main de la Fédération, l’instance faîtière du ballon rond tricolore, sur la LFP qui opère seulement dans le cadre d’une délégation de pouvoir. Si le projet est mis en œuvre, la FFF prévoit de récupérer aussi la Direction nationale de contrôle et de gestion (DNCG) et la commission de discipline. Philippe Diallo a souligné que la FFF pourrait également exercer un droit de veto sur les questions d’intérêt général, comme le changement de format des compétitions ou le nombre de montées et de descentes entre divisions.
Au niveau économique et financier, le patron de la FFF veut remettre les clubs sur de bons rails pour leur permettre de retrouver « une trajectoire d’équilibre ». Ces derniers doivent en effet présenter à la DNCG, début juin, leurs budgets prévisionnels 2025-2026 sans droits télé. Après la sortie actée du diffuseur DAZN dès la fin de cette saison, alors qu’il avait signé pour quatre ans, la Ligue se dirige en effet vers la création de sa propre chaîne 100 % L1. Un projet qui pose beaucoup de questions en termes de production, diffusion, prix d’abonnements et rentabilité.
Un plafonnement de la masse salariale des clubs
Un changement de modèle économique devrait aussi être mis en place avec « des dispositifs de limitation des effectifs » (nombre de joueurs) et « un plafonnement de la masse salariale » des clubs. Par ailleurs, la FFF souhaite une négociation sur une répartition différente des droits audiovisuels, afin que « ceux qui n’ont rien aient quelque chose ». Jusqu’à présent, la répartition s’effectue principalement en fonction du résultat sportif avec une redistribution décroissante selon le classement final. Enfin, « un regard plus attentif » sera posé « sur les questions de multipropriétés » de clubs.
Inspiré du modèle anglais en ce qui concerne l’aspect commercial, ce projet est un enterrement de première classe pour la Ligue. Vincent Labrune, son président, réélu en septembre jusqu’en 2028, qui a participé aux travaux, a pourtant indiqué qu’il était « très favorable à une évolution vers un modèle proche de celui de la Premier League, qui a largement démontré son efficacité ». Quid de son avenir en tant que président d’une Ligue remplacée par une « société de clubs » ? « Chacun déterminera s’il rentre dans le cadre de ce projet ou pas », a précisé Philippe Diallo.
Pour lancer cette réforme, ce dernier a indiqué la nécessité d’aller sur le « terrain législatif ». L’examen, le 10 juin au Sénat, d’une proposition de loi de Michel Savin (LR) et Laurent Lafon (UDI) sur la gouvernance du sport professionnel tombe à pic.
La proposition de loi, très critiquée par les différentes ligues professionnelles, offre la possibilité aux fédérations de retirer à ces dernières la « subdélégation de service public » qu’elles exercent en cas de « manquement à l’intérêt général de la discipline ». Ensuite, selon le calendrier législatif et les allers-retours entre l’Assemblée et le Sénat, sans même parler de l’instabilité parlementaire actuelle, la réforme pourrait voir le jour « au mieux pour la saison 2026-2027 ».
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Auteur : Nicolas Guillermin
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